Les psychologues Rumelhart et Norman ont apporté une contribution importante à la théorie générale des schémas. Les applications sont doubles. Elles permettent de mieux comprendre l’analyse du traitement cognitif ainsi que l’acquisition des connaissances.
Qu’est ce qu’un schéma cognitif ?
Ce concept de schéma cognitif provient de la psychologie cognitive et de la psycholinguistique.
Selon David Rumelhart (Schemata: les blocs de construction de la cognition (1980)) les schémas sont des structures de données permettant de représenter des concepts génériques qui sont stockés en mémoire. En quelque sorte ce sont des gabarits type de concepts ou des modèles cognitifs d’information. Ils définissent aussi les relations entre différents éléments de la connaissance. Traiter de l’information revient à trouver et utiliser le schéma stocké en mémoire qui est le plus adéquat pour la comprendre.
Ces schémas représentent toutes nos expériences humaines qu’elles soient abstraites et complexes, comme des raisonnements philosophiques ou mathématiques, ou des choses plus élémentaires comme des gestes à réaliser dans certaines situations.
Rumelhart et Norman (Rumelhart & Norman, 1983) synthétisent les caractéristiques des schémas :
- Les schémas comportent des variables. Ces variables ont des valeurs par défaut et l’on sait à l’avance quelles valeurs sont possibles ou non. Ces cases ou slots peuvent par exemple pour une voiture avoir pour valeur : la couleur (rouge, noire, blanche …), la marque de la voiture …Si l’on ne connait pas la marque de la voiture on sait tout de même que c’est une voiture.
- Un schéma n’est pas qu’un système hiérarchique avec des attributs. Il est souvent constitué de plusieurs sous-schémas, qui peuvent eux-mêmes être constitués d’autres sous-sous-schémas. Par exemple le schéma générique de « appartement » est un constituant du schéma générique « d’immeuble », qui lui même englobe les schémas « chambre », « portes », etc…
- Les schémas représentent des connaissances à tous les niveaux : abstraction complexe, expériences physiques … Ces connaissances possèdent une hiérarchie, de telle sorte que le niveau le plus élevé d’un schéma possède les propriétés les plus symboliques et générales. Les niveaux inférieurs ont des caractéristiques plus spécifiques.
- Les schémas représentent des connaissances sémantiques de type dictionnaire mais aussi épisodiques issues de l’expérience personnelle.
- Les schémas cognitifs sont des processus de reconnaissance. Ils permettent d’évaluer leur pertinence avec les informations en cours de traitement.
- Les schémas spécifient les règles qu’entretiennent les composants qui les composent c’est à dire les relations entre les composants. Ce qui est possible, probable ou impossible entre eux. Exemples : un appartement peut avoir un jardin ou pas, un appartement contient obligatoirement une cuisine, mais une ou plusieurs chambres, un appartement n’est pas dans une voiture … Si ces règles sont violées cela entraîne un nouvel examen du texte ou la substitution d’un nouveau schéma, plus compatible que le précédent.
- Toutes ces spécifications des règles permettent d’éviter de préciser certaines choses dans l’expression ou dans la réflexion. Exemple : « Si l’on dit il prit ses clés et entra dans la salle de formation ». Cela sous entend qu’il introduisit les clés dans la serrure, puis tourna les clés ce qui engendra l’ouverture de la serrure … Cela génère des inférences qui simplifient la réflexion, le discours, la mémorisation.
Pour conclure de manière métaphorique Rumelhart (1980) a comparé un schéma à une pièce de théâtre. En effet une pièce de théâtre peut être jouée par différents acteurs et dans des différents décors sans que ces instanciations ne changent sa structure.
La théorie du schéma général de Rumelhart et Norman
Dans un article intitulé “Accretion, Tuning, and Restructuring: Three Modes of Learning” David Rumelhart et Donald Norman montrent que l’apprentissage n’est pas un processus unitaire. C’est-à-dire qu’il n’y pas une méthode ou un processus d’apprentissage mais plusieurs. Plus exactement il y aurait trois modes d’acquisition de la connaissance : l’accumulation, l’ajustement et la restructuration.
Le premier processus ou processus de base est l’accumulation d’informations que nous réalisons au quotidien au travers de nos sens et de notre cognition. Il s’agit là de connaissances qui viennent alimenter des structures déjà existantes. Il n’y a pas de changement structural. Par exemple, on vient ajouter de nouvelles dates en histoire, le nom d’un nouveau végétal inconnu jusque là, les noms des présidents de la république… Ces concepts sont déjà existants dans notre cerveau on ne vient qu’ajouter un élément supplémentaire à notre base de connaissances.
Cette accumulation (Accretion) n’est possible que lorsque les nouvelles informations sont compatibles avec les schémas que nous avons déjà.
Si ces nouvelles informations ne sont pas compatibles, c’est-à-dire si l’on ne trouve pas de schéma permettant d’intégrer ces nouvelles connaissances il peut y avoir de légères modifications du schéma. C’est ce que l’on appelle l’ajustement (Tuning).
Si l’écart est trop important cela nécessite pour la mémoire de se restructurer (Restructuring). Ce processus de restructuration est défini comme la création d’un nouveau schéma. La restructuration se produit quand de nouvelles structures sont créées pour interpréter de nouvelles informations et imposer une nouvelle organisation sur celles déjà créées. Ce nouveau schéma sera le fruit de la combinaison de schémas existants.
En résumé Rumelhart et Norman propose 3 types d’acquisition des connaissances :
- l’accumulation : qui est un ajout à notre base de connaissance
- le tuning implique l’évolution d’anciennes structure de mémoire en de nouvelles structures
- la restructuration implique la création le nouvelle structure de mémoire